Par Léa Trentalaud, consultante senior chez CHEFCAB

En ce premier jour du mois d’août, à l’heure où les messages automatiques d’absence fleurissent dans les boîtes mails, les congés sont sur toutes les lèvres. Si le Premier ministre a suscité une levée de boucliers en proposant de supprimer 2 jours fériés, dans une logique de restrictions budgétaires, l’époque et la situation des finances publiques semblent aller vers une rationalisation des congés. La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a également mis à la discussion la possibilité de monétiser la cinquième semaine de congés payés, attisant l’ire des syndicats.

Si l’Union européenne porte à 4 le nombre de semaines de congés payés obligatoires pour ses Etats membres, la France fait figure de bon élève, avec ses 5 semaines obligatoires de congés payés chaque année, au côté de l’Autriche, de la Suède ou encore du Danemark. Pour autant, l’Espagne, Malte, le Luxembourg et l’Estonie affichent quelques jours supplémentaires. Dans les faits, les salariés français bénéficient dans de nombreux cas de jours supplémentaires à ceux réglementaires, issus d’accords de branches ou d’entreprises.

« Alors que près de 45% des salariés souffriraient de détresse psychologique, selon le dernier paramètre Empreinte Humaine, les congés constituent des temps de respiration cruciaux pour assurer un bon équilibre entre vie personnelle et professionnelle. »

Selon une étude de la société américaine de psychologie, en date de 2019, les individus prenant des vacances de façon régulière éprouvent des niveaux de stress nettement inférieur aux salariés bénéficiant de moins de congés. Les congés amélioreraient également la réponse du corps au stress, et ce jusqu’à 4 semaines après la reprise du travail. Au-delà des aspects physiologiques, l’OIT a montré que les vacances permettent d’améliorer la productivité à long terme. Selon une autre étude, chaque journée de vacances supplémentaires augmenterait de près de 8% la productivité des salariés.

Aussi, certaines entreprises ont choisi de faire des congés un véritable outil d’attractivité, de fidélisation des talents, et d’amélioration de la performance à long terme de leurs salariés. Plusieurs stratégies ont pu être observées au cours des dernières années : augmentation du nombre de semaines de congés en fonction de l’ancienneté chez Adobe, possibilité de prendre un congé sabbatique rémunéré après 4 ans passés dans l’entreprise chez Google, “congé de respiration” chez Orange, permettant de faire une pause de quelques mois avec garantie de retrouver son poste au retour, etc.

« Pour les salariés, les bénéfices semblent évidents. Mais pour les employeurs, le résultat est aussi probant : fidélisation et attraction de nouveaux talents, remotivation des salariés, prévention des risques psychosociaux, et développement d’une politique RSE attractive.»

D’autres entreprises font des congés un levier d’engagement environnemental : la start-up française Vendredi, spécialiste de la RSE, propose ainsi un jour de congé supplémentaire à ses salariés qui font le choix d’un voyage de plus de 6 heures en train. Outre Atlantique, Netflix a instauré une politique de “congés illimités” pour ses salariés, misant sur leur autonomie et leur responsabilisation. Cependant, cette mesure pourrait être contre-productive, puisque l’on observe finalement moins de vacances demandées, les salariés craignant de paraître moins investis en prenant trop de congés.

A l’heure où la quête de sens au travail et l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle sont au cœur des préoccupations des nouveaux actifs, les vacances doivent être considérées non comme une contrainte organisationnelle pour les entreprises, mais comme un outil clé du bien-être au travail. Plutôt que de voir les congés comme une dépense, ou comme une option que les salariés pourraient échanger contre rémunération, envisageons-les comme un investissement stratégique, au bénéfice des entreprises et des actifs.