Par Nicolas Citti, consultant chez CHEFCAB :

2023 s’achève ; Et quelle année !

Débutant par une crise sociale hivernale de grande ampleur avec la séquence des retraites, suivie par d’importantes émeutes urbaines dans la chaleur estivale, cette étrange année se clôt par une crise politique sans précédent, où des alliances plus que baroques se créent à l’Assemblée, et où le camp présidentiel se fissure autour du projet de loi immigration. Tout cela sur fond de crispations internationales inédites depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il faut bien l’avouer, cette année s’achève avec pertes et fracas.

Cette étrange année se clôt par une crise politique sans précédent, où des alliances plus que baroques se créent à l’Assemblée

Toutefois, au-delà des crispations politiques et sociales, l’année 2023 a aussi été riche sur le front des compétences. Évoquons brièvement ce qui a été entrepris et les perspectives pour l’année à venir.

Dans un premier temps, rappelons que plus d’une vingtaine de départements ont su dès le début 2023 se mobiliser pour expérimenter l’accompagnement rénové des bénéficiaires du RSA. Cet accompagnement s’est pleinement inscrit dans le chantier de préfiguration de France Travail, dont le rapport a été remis le 18 avril dernier au ministre Olivier Dussopt. Ainsi, durant plusieurs mois, les départements ont en ce sens transformé leurs bassins d’emploi pour en faire le cœur de l’action publique en matière d’inclusion, d’orientation et surtout de formation, condition sine qua non à une insertion durable et pérenne. La prise en charge des bénéficiaires a été ainsi modernisée, complètement repensée, avec un suivi sur-mesure et avec des droits et devoirs le guidant progressivement vers l’emploi.

Dans ce sillage, la loi plein-emploi, votée en octobre dernier et promulguée cette semaine, est l’accomplissement d’un long chemin marqué tantôt par des concertations, des débats et des oppositions. Fruit d’un accord, cette loi acte la création d’un véritable réseau pour l’emploi, œuvrant pour un meilleur accompagnement des demandeurs d’emploi, et une coordination renforcée des acteurs de l’emploi. Le futur réseau devra également permettre de mieux inclure les travailleurs handicapés, et de consolider l’accompagnement des entreprises dans leurs processus de recrutement. L’idée principale est, en effet, de fluidifier les relations entre les demandeurs d’emplois et les entreprises qui peinent encore à recruter, de mieux articuler l’offre avec la demande.

La loi plein-emploi, votée en octobre dernier et promulguée cette semaine, est l’accomplissement d’un long chemin

Dès lors, cette année se clôture par une nomination à bas bruit cette semaine, évincée médiatiquement par les houleux débats sur l’immigration. En effet, nous avons depuis jeudi 21 décembre un nouveau Directeur général à la tête de Pôle Emploi, en la personne de Thibaut Guilluy, jusqu’alors Haut Commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises.

Les enjeux sont immenses ; à court terme, il s’agira pour M. Guilluy de mobiliser les quelque 50 000 salariés de l’opérateur public dans sa transformation en France Travail. Ses 100 premiers jours consisteront à «aller à la rencontre des équipes, voir leur réalité et leurs attentes», tout en «faisant de la pédagogie», explique-t-il dans un récent article du Figaro. A moyen terme, sa mission devra permettre une accélération des créations d’emploi durable, et répondre à la demande croissante de main d’œuvre pour les entreprises. Ainsi, l’objectif clairement affiché est d’atteindre les 5% de taux de chômage d’ici à 2027, alors que le taux de chômage devrait augmenter à la mi-2024 pour s’établir à 7,6% de la population active, selon une récente prévision de l’INSEE. Mais, prévient-il, « Nous assumons nous inscrire dans le temps long, avec des projets qui continuent à monter en puissance».

Il s’agira pour M. Guilluy de mobiliser les quelque 50 000 salariés de l’opérateur public dans sa transformation en France Travail

Par conséquent, le travail méthodique de Thibaut Guilluy s’inscrit dans la durée, et nul doute que 2024 sera non seulement une année studieuse pour les équipes de France Travail, mais également une autre année, pour nous tous, déterminante sur le front escarpé de l’emploi.