Par Alexandra Gaboriau, consultante chez Chefcab
Ce qui pèse aujourd’hui sur l’économie tricolore n’est plus le clivage idéologique, mais la succession de signaux contradictoires. En abaissant la note souveraine de la France à A+, le 12 septembre dernier, Fitch pointait à la fois un déficit durablement élevé, et implicitement une instabilité politique chronique.
Le « moratoire » sur les énergies renouvelables en est l’illustration. En quelques heures, la rumeur d’un gel des projets solaires et éoliens, relayée par Contexte, a mis en émoi toute une filière. Le Premier ministre a démenti dans Le Parisien, mais le mal était fait.
« L’épisode rappelle celui de 2010, quand un décret du gouvernement avait instauré un moratoire sur le photovoltaïque en suspendant les nouveaux contrats d’achat d’électricité, provoquant la perte de 20 000 emplois et l’assèchement de l’investissement. »
Aujourd’hui, le secteur emploie 118 000 personnes et génère plus de 21 milliards d’euros d’investissements annuels. Sa demande est simple : de la visibilité.
Ce débat est d’autant plus surprenant qu’il va à rebours de l’opinion de l’électorat de droite. Un sondage Kantar publié par Politico montre que plus de 8 sympathisants de droite sur 10 sont favorables aux aides à la rénovation, et 3 sur 4 au doublement du parc solaire et éolien d’ici 2030. Là où certains élus temporisent, leurs électeurs réclament un renforcement net.
L’incertitude ne se limite pas à l’énergie : elle s’invite aussi sur le terrain fiscal. La « taxe Zucman », impôt plancher de 2 % sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros, recueille 86 % d’approbation selon un sondage Ifop – y compris 89 % chez les sympathisants LR et 92 % chez ceux de Renaissance.
« Même les enquêtes les plus prudentes lui donnent deux tiers de soutien. Paradoxe : cette adhésion traverse l’échiquier politique, mais le Sénat l’a rejetée et plusieurs responsables du « socle commun » la jugent confiscatoire »
Le nouveau locataire de Matignon, lui, temporise. Sébastien Lecornu a reconnu dans les colonnes du Parisien une aspiration forte à plus de justice fiscale, tout en posant ses limites : ni ISF, ni pénalisation de l’outil de travail. Le rendement attendu ne dépasserait pas cinq milliards d’euros. Et ce vendredi 3 octobre, Sébastien Lecornu a choisi de renoncer à l’article 49.3, promettant une “nouvelle méthode” faite de compromis parlementaires. Une rupture assumée, mais qui ouvre aussi la porte à des majorités mouvantes et à des amendements imprévisibles. Certes, le gouvernement conserve des outils de contrôle et le Sénat reste un contrepoids. Mais pour les investisseurs comme pour les filières économiques, le constat est simple, l’instabilité n’est jamais gratuite.