Par Camille Bourgeois, consultante chez CHEFCAB

Vous pourrez facilement en témoigner en consultant les pages internets de vos marques préférées, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à communiquer sur leurs engagements RSE et autres actions en faveur du développement durable. S’il s’agit pour certaines d’une simple opération de communication, nombreuses sont celles qui mettent en place des actions à leur échelle pour prendre part à la transition écologique. Elles ont en effet tout intérêt à le faire. Si les récentes législations et réglementations les incitent à prendre leur part de responsabilité et à agir en conséquence, il s’agit également d’un réel argument marketing à l’heure où les attentes des consommateurs s’orientent de plus en plus vers des services et produits durables. 

« le Shift Project estime à 1,1 million le nombre d’emplois de ce type qui devraient être créés d’ici 2050 pour supporter la transition écologique »

C’est donc logiquement que le cabinet de consulting Sia Partners s’est posé la question de l’effet de ce verdissement sur l’emploi, véritable enjeu des années à venir. Le rapport, intitulé “Green jobs : Les entreprises font-elles pousser les emplois verts ?”, définit la notion d’emplois verts comme contribuant activement à la “transition vers des sociétés et des économies plus durables”. Alors que le Shift Project estime à 1,1 million le nombre d’emplois de ce type qui devraient être créés d’ici 2050 pour supporter la transition écologique, l’étude, publiée en début de semaine, soulève la question cruciale de l’adaptation des politiques RH des entreprises pour accompagner cette transition.

« En France, moins de 6% des emplois seraient considérés comme verts en 2023 »

Ses conclusions contrastent pour le moins avec la dynamique de verdissement décrite plus tôt. En France, moins de 6% des emplois seraient considérés comme verts en 2023. Et les perspectives futures ne sont pas plus positives, puisqu’une entreprise sur trois ne publie à ce jour aucune offre d’emplois verts. Le rapport fait également état de fortes disparités entre les secteurs. Si l’on peut se réjouir du fait que le secteur des transports, premier secteur émetteur de GES en France, concentre le plus d’emplois verts, la distribution, la grande consommation et les services financiers accusent eux un retard significatif.

« la création par les entreprises de métiers verts et de fiches de postes adaptées pourrait avoir un effet significatif sur la capacité globale de la France à bifurquer vers un modèle d’emplois durables »

Or, au-delà de rendre plus efficaces leurs stratégies de verdissement, la création par les entreprises de métiers verts et de fiches de postes adaptées pourrait avoir un effet significatif sur la capacité globale de la France à bifurquer vers un modèle d’emplois durables. En effet, en renforçant la visibilité des emplois verts, les entreprises inciteraient davantage d’actifs et de demandeurs d’emploi à s’adapter à ces nouvelles compétences au cours de leur parcours de formation. Comme l’illustrent les multiples discours de jeunes diplômés à cet égard, cela leur permettrait également d’attirer de nouveaux talents qui mettent l’engagement environnemental au centre de leurs priorités. Dans le même temps, cette stratégie permettrait d’envoyer des signaux forts aux pouvoirs publics. En effet, l’expression de ces nouveaux besoins des entreprises en métiers verts a vocation à favoriser l’orientation des investissements dans le développement des compétences vertes et in fine d’adapter l’appareil de formation à ces nouvelles attentes.

Ni la planification gouvernementale en matière d’emploi, ni sa déclinaison locale, ne suffiront à gagner la bataille des compétences qui s’annonce. Les entreprises ont en effet leur rôle à jouer dans la concrétisation de ces objectifs en ce qu’elles disposent du pouvoir de rendre visibles les enjeux croisés de la transition écologique et de l’emploi. Si elles ne le font pas, elles seront par ailleurs parmi les premières victimes de la pénurie de compétences adaptées à leurs nouveaux modèles économiques. Il est donc urgent qu’elles en prennent la mesure et agissent en conséquence afin de susciter en interne une dynamique de verdissement des métiers qui se reflètera au niveau national.